Lot Essay
« Dans son œuvre se fondaient un rythme venu du fonds des temps, une sobriété et un humour où les arbres, les oiseaux, les grenouilles venaient le rejoindre. » (Henri Cartier-Bresson cité dans D. Marchesseau, Diego Giacometti, Hermann, Paris, 1986, p. 24)
Bercé depuis sa plus tendre enfance par le chant des oiseaux et le croassement des grenouilles, Diego Giacometti grandit dans une ambiance faite de livres et de tableaux à l’ombre d’une campagne reculée du canton des Grisons à la frontière italienne de la Suisse. Le jeune Diego s’inscrit dans une lignée au patronyme fort, frère d’Alberto, de treize mois son cadet, l’artiste discret marquera les arts décoratifs du XXe siècle de son prénom. Artiste, artisan, meublier ou encore sculpteur, autant de qualificatifs qu’il conviendrait d’attribuer rétrospectivement à Diego Giacometti, longtemps effacé dans l’ombre de son frère. Faisant du meuble son domaine, l’artiste donne à voir des architectures réduites réalisées dans une complète maîtrise technique : les proportions sont parfaites et le bronze est sublimé : « la texture entière de ses objets garde, après l’épreuve du feu, la flexion vive de ses doigts et chaque réplique a sa tonalité distincte » (Jean Leymarie, op. cit., p. 18). Mais c’est dans la subtilité de ses patines que se révèle le génie de Diego Giacometti, ses nuances chromatiques donnant à s’émerveiller.
Rares sont ceux qui, comme Lady Mercia Harrison, ont su éveiller l’amitié de cet homme hors du commun aux odeurs de plâtre, sensible et taiseux, dont les mains travailleuses ne se travestissaient pas de mondanités. Veuve du célèbre acteur britannique des années 1960 Sir Rex Harrison, Lady Mercia Harrison est une collectionneuse passionnée d’art. Lors d’un cocktail à Zurich, Mercia s’enthousiasme devant les créations de Diego. Sans hésiter elle décroche son téléphone pour inviter à déjeuner celui qu’elle appellera ‘Maître’ avec un mélange d’humour et d’admiration. Se voyant décliner son invitation, Lady Harrison n’hésite pas, elle prend un avion et sonne rue Hippolyte-Maindron à la porte de ce petit atelier niché au cœur de Montparnasse qu’occupait Diego Giacometti : c’est le début d’une profonde amitié qui liera ces deux anticonformistes jusqu’à la mort de l’artiste.
L’ensemble présenté ici donne à voir un témoignage du travail réalisé par Diego Giacometti pour Lady Harrison : les tables chantent, les fauteuils trônent majestueusement et les consoles content des histoires de vie à la campagne. L’exceptionnelle console ‘Promenade des amis’ (lot 68) dont l’entretoise « réunit trois chiens de chasse en goguette dont l’un marque son territoire contre un arbre, devant un cheval à l’arrêt » (D. Marchesseau, Diego Giacometti, éditions du regard, Paris, 2018, p. 38) est ici soutenue par deux traverses en bronze patiné, adaptation particulièrement rare dans le paysage créatif de l’artiste comme un decorum à ce sentier de féérie. Dans cet ensemble chaque pièce est ponctuée de l’espiègle bestiaire animalier de Diego Giacometti : tantôt rainettes, moineaux, chevaux, chiens, lionnes ou encore chauve-souris font spontanément leur apparition sur le montant d’un fauteuil ou l’entretoise d’une table. Le verre vient alors subtilement souligner la ligne aérienne de ces créations dans une grande légèreté visuelle.
Avec cet ensemble Diego Giacometti nous donne à voir « un exemple singulier d’indépendance et de sagesse amusée (..) son destin d’artisan-poète unissant au souci de l’utile le charme et la fraîcheur du merveilleux ». (Jean Leymarie, op. cit., p. 22)
"In his work there was a rhythm from the depths of time, a sobriety and a humour in which trees, birds and frogs came to join him." (Henri Cartier-Bresson in D. Marchesseau, Diego Giacometti, Hermann, Paris, 1986, p. 24)
Lulled from his earliest childhood by birdsongs and the croaking of frogs, Diego Giacometti grew up in an atmosphere of books and paintings, living in the remote countryside of the Grisons canton on the Italian border with Switzerland. Young Diego was part of a lineage with a strong family name: brother of Alberto, thirteen months his junior, the discreet artist left a definite imprint on the decorative arts of the 20th century. Artist, craftsman, furniture-maker and sculptor —these are just some of the adjectives that can be applied to Diego Giacometti in retrospect, after he had long been overshadowed by his older brother. Making furniture design his domain, the artist presented reduced architectures created with complete technical mastery: perfect proportions and beautifully enhanced bronzes: “the entire texture of his objects retains, after the test of fire, the lively bending of his fingers and each replica has its own distinctive tonality” (Jean Leymarie, op. cit., p. 18). But it is in the subtlety of his patinas that Diego Giacometti’s genius was revealed, his chromatic nuances were a source of utter wonder.
The ensemble presented here bears witness to Diego Giacometti’s creative work for Lady Harrison: the tables sing, the armchairs sit majestically and the consoles tell stories of life in the countryside. The exceptional Promenade des amis (lot 68) console, whose crosspiece “brings together three roaming hounds, one of them marking its territory against a tree, in front of a horse at a standstill” (D. Marchesseau, Diego Giacometti, éditions du regard, Paris 2018, p. 38) is supported by two patinated bronze crossbars, a particularly rare adaptation in the artist’s fanciful landscape as a decorum for this fairy tale path. Here, each artefact is punctuated by Diego Giacometti’s mischievous animal bestiary: tree frogs, sparrows, horses, dogs, lions and even bats make spontaneous appearances on the backrest of an armchair or the crosspiece of a table. The glass subtly underscores the light, airy lines of these delicate creations. With this ensemble, Diego Giacometti shows us “a singular example of independence and amused wisdom (...) his destiny as a craftsman-poet, combining concern for the useful with the charm and freshness of the marvellous ”. (Jean Leymarie, op. cit., p. 22)
Bercé depuis sa plus tendre enfance par le chant des oiseaux et le croassement des grenouilles, Diego Giacometti grandit dans une ambiance faite de livres et de tableaux à l’ombre d’une campagne reculée du canton des Grisons à la frontière italienne de la Suisse. Le jeune Diego s’inscrit dans une lignée au patronyme fort, frère d’Alberto, de treize mois son cadet, l’artiste discret marquera les arts décoratifs du XXe siècle de son prénom. Artiste, artisan, meublier ou encore sculpteur, autant de qualificatifs qu’il conviendrait d’attribuer rétrospectivement à Diego Giacometti, longtemps effacé dans l’ombre de son frère. Faisant du meuble son domaine, l’artiste donne à voir des architectures réduites réalisées dans une complète maîtrise technique : les proportions sont parfaites et le bronze est sublimé : « la texture entière de ses objets garde, après l’épreuve du feu, la flexion vive de ses doigts et chaque réplique a sa tonalité distincte » (Jean Leymarie, op. cit., p. 18). Mais c’est dans la subtilité de ses patines que se révèle le génie de Diego Giacometti, ses nuances chromatiques donnant à s’émerveiller.
Rares sont ceux qui, comme Lady Mercia Harrison, ont su éveiller l’amitié de cet homme hors du commun aux odeurs de plâtre, sensible et taiseux, dont les mains travailleuses ne se travestissaient pas de mondanités. Veuve du célèbre acteur britannique des années 1960 Sir Rex Harrison, Lady Mercia Harrison est une collectionneuse passionnée d’art. Lors d’un cocktail à Zurich, Mercia s’enthousiasme devant les créations de Diego. Sans hésiter elle décroche son téléphone pour inviter à déjeuner celui qu’elle appellera ‘Maître’ avec un mélange d’humour et d’admiration. Se voyant décliner son invitation, Lady Harrison n’hésite pas, elle prend un avion et sonne rue Hippolyte-Maindron à la porte de ce petit atelier niché au cœur de Montparnasse qu’occupait Diego Giacometti : c’est le début d’une profonde amitié qui liera ces deux anticonformistes jusqu’à la mort de l’artiste.
L’ensemble présenté ici donne à voir un témoignage du travail réalisé par Diego Giacometti pour Lady Harrison : les tables chantent, les fauteuils trônent majestueusement et les consoles content des histoires de vie à la campagne. L’exceptionnelle console ‘Promenade des amis’ (lot 68) dont l’entretoise « réunit trois chiens de chasse en goguette dont l’un marque son territoire contre un arbre, devant un cheval à l’arrêt » (D. Marchesseau, Diego Giacometti, éditions du regard, Paris, 2018, p. 38) est ici soutenue par deux traverses en bronze patiné, adaptation particulièrement rare dans le paysage créatif de l’artiste comme un decorum à ce sentier de féérie. Dans cet ensemble chaque pièce est ponctuée de l’espiègle bestiaire animalier de Diego Giacometti : tantôt rainettes, moineaux, chevaux, chiens, lionnes ou encore chauve-souris font spontanément leur apparition sur le montant d’un fauteuil ou l’entretoise d’une table. Le verre vient alors subtilement souligner la ligne aérienne de ces créations dans une grande légèreté visuelle.
Avec cet ensemble Diego Giacometti nous donne à voir « un exemple singulier d’indépendance et de sagesse amusée (..) son destin d’artisan-poète unissant au souci de l’utile le charme et la fraîcheur du merveilleux ». (Jean Leymarie, op. cit., p. 22)
"In his work there was a rhythm from the depths of time, a sobriety and a humour in which trees, birds and frogs came to join him." (Henri Cartier-Bresson in D. Marchesseau, Diego Giacometti, Hermann, Paris, 1986, p. 24)
Lulled from his earliest childhood by birdsongs and the croaking of frogs, Diego Giacometti grew up in an atmosphere of books and paintings, living in the remote countryside of the Grisons canton on the Italian border with Switzerland. Young Diego was part of a lineage with a strong family name: brother of Alberto, thirteen months his junior, the discreet artist left a definite imprint on the decorative arts of the 20th century. Artist, craftsman, furniture-maker and sculptor —these are just some of the adjectives that can be applied to Diego Giacometti in retrospect, after he had long been overshadowed by his older brother. Making furniture design his domain, the artist presented reduced architectures created with complete technical mastery: perfect proportions and beautifully enhanced bronzes: “the entire texture of his objects retains, after the test of fire, the lively bending of his fingers and each replica has its own distinctive tonality” (Jean Leymarie, op. cit., p. 18). But it is in the subtlety of his patinas that Diego Giacometti’s genius was revealed, his chromatic nuances were a source of utter wonder.
The ensemble presented here bears witness to Diego Giacometti’s creative work for Lady Harrison: the tables sing, the armchairs sit majestically and the consoles tell stories of life in the countryside. The exceptional Promenade des amis (lot 68) console, whose crosspiece “brings together three roaming hounds, one of them marking its territory against a tree, in front of a horse at a standstill” (D. Marchesseau, Diego Giacometti, éditions du regard, Paris 2018, p. 38) is supported by two patinated bronze crossbars, a particularly rare adaptation in the artist’s fanciful landscape as a decorum for this fairy tale path. Here, each artefact is punctuated by Diego Giacometti’s mischievous animal bestiary: tree frogs, sparrows, horses, dogs, lions and even bats make spontaneous appearances on the backrest of an armchair or the crosspiece of a table. The glass subtly underscores the light, airy lines of these delicate creations. With this ensemble, Diego Giacometti shows us “a singular example of independence and amused wisdom (...) his destiny as a craftsman-poet, combining concern for the useful with the charm and freshness of the marvellous ”. (Jean Leymarie, op. cit., p. 22)